Il faut aimer les Belges. Les aimer d’amour.
Je veux dire, les artistes belges. Les peintres. Et avec eux, les poètes. Les sculpteurs. D’ailleurs, ils se ressemblent.
Regardez Pierre Buisseret : sa peinture ne se contente pas de vous offrir une partie de plaisir, une vache dans les prés, un clocher, une grasse prairie. Non. Pierre Buisseret nous offre à la fois l’espace, le ciel, l’infini peut- être, et plus grave encore : tout ce que notre âme est capable de retrouver dans le monologue du peintre. Cela s’appelle la liberté de vivre et d’aimer. Presque un pari sur l’avenir.
A propos de l’art, Giacometti avait cette réflexion qui en dit long, sur ce qui se noue entre celui ou celle qui regarde la toile, et le peintre qui nous l’offre : insister, même si ça « rate ». C’est du sérieux en effet.
Pierre Buisseret nous donne le feu vert pour reconstituer un monde - le modeler même - que seuls les artistes sont en mesure de capter. Une merveilleuse caravane de nuages gris, surplombant une pierre de toutes les couleurs. Ou bien ces encres - comme une obsession sur la toile - qui nous obligent à retourner en enfance. Cailloux, fils, grilles, densité d’un noir qui s’entrelace. Algues parfois. « On me dit que là-bas les plages sont noires, de la lave allée à la mer et se déroulent au pied d’un immense pic fumant de neige… » écrit André Breton dans « Clair de terre » « Imagination n’est pas don, mais objet de conquête » ajoute le poète surréaliste.
Personne ne s’étonnera que Pierre Buisseret, en 1968, fut diplômé de l’Académie Royale des Beaux-Arts de Bruxelles. Splendide pas de côté quand au même moment, de grands chambardements préparaient de futurs notaires. Au fond, lequel d’entre nous peut-être convaincu d’une réalité immuable, toujours recommencée ?
Sommes- nous ici, ou ailleurs, il y a mille ans ?
La question vaut le coup d’être posée. Quand je pense à Pierre Buisseret, je sais bien qu’il faut faire silence lorsqu’on regarde ses toiles. Il m’a confié que l’acrylique – comme un décor de théâtre-, sèche vite. Très vite. Alors je l’imagine dans sa conquête de l’imaginaire, prendre déjà rendez- vous avec des ciels, des horizons perdus, des formes invisibles qui lui rappellent son amour de la sculpture. Il fut un temps où Pierre Buisseret sculptait de petites vertèbres aux couleurs crèmes ou, plus vives, comme ces osselets que nous aimions tant glisser dans nos poches pour la prochaine cour de récréation. C’est ainsi qu’en pénétrant dans le monde de Pierre Buisseret, vous ne ferez jamais l’économie du jeu et des rêves. Un homme qui ne rêve plus est un homme mort. Pierre Buisseret est vivant. Je le croise régulièrement sous les ciels changeants de Normandie.
Bon et beau voyage !
Pierre - Louis Basse.
Dernier ouvrage paru: « Je t’ai oubliée en chemin » Le Cherche Midi.